Édito

Pas de fausse symétrie le jour du vote

Publié le 1 juillet 2024
On a beau s’attendre à certaines catastrophes, elles font mal quand elles se produisent. C’est ce que ressentent tous les démocrates et républicains sincères aujourd’hui face aux résultats du Rassemblement national au premier tour des élections législatives de 2024. Si le pire n’est pas encore sûr, il est désormais clairement possible : le RN est en situation d’emporter une majorité absolue à l’Assemblée nationale ou, à défaut, une majorité relative suffisamment large pour être en mesure de gouverner le pays.
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Le voulons-nous ? C’est la seule question qui compte, celle qui domine aujourd’hui toutes les autres. Et notre réponse est non. Nous n’avons pas ménagé nos efforts ces dernières années pour démontrer la véritable nature du projet de ce parti : un projet xénophobe, anti-écologique et contraire aux exigences de l’Etat de droit et de la démocratie libérale.

Il nous reste quelques jours pour empêcher le RN d’accéder au pouvoir. Et le meilleur moyen d’y parvenir est de faire en sorte que tous les candidats républicains soutiennent celui d’entre eux qui est le mieux placé et se désistent en sa faveur. Le RN a atteint un tiers des suffrages exprimés. Ce qui signifie que deux tiers des électeurs ont fait un autre choix et ne souhaitent probablement pas le voir arriver à Matignon. C’est cette majorité du refus qu’il s’agit de rassembler dans toutes les circonscriptions où elle peut l’être.

La plupart des formations du bloc présidentiel en acceptent le principe mais certains en son sein y mettent une limite : ils veulent bien soutenir les candidats du Nouveau Front Populaire, sauf s’il s’agit d’un candidat issu des rangs de la France insoumise, ou bien ils réservent leur décision dans ce cas précis. Pourtant, si l’on veut vraiment que le RN soit le plus souvent battu, il faudra bien que ce soit quelquefois par un candidat LFI. Le bulletin LFI sera alors simplement, dans les mains des électeurs centristes ou de centre-gauche, une arme par destination contre le RN. C’est la logique du scrutin majoritaire à deux tours : au deuxième tour, on élimine !

On peut entendre les tourments de conscience des uns et des autres au sujet des méthodes et des engagements des Insoumis mais, à la fin, ces scrupules très respectables travaillent pour le RN. Nous n’avons jamais ménagé le mouvement de Jean-Luc Mélenchon dans ces pages et nous ne changerons pas d’attitude demain. Mais nous préférons quelques sièges de plus pour LFI à l’Assemblée plutôt que Jordan Bardella à Matignon et demain la suppression du droit du sol, la présomption de légitime défense pour les forces de l’ordre, la préférence nationale pour les prestations sociales, l’interdiction de certains emplois pour les binationaux, la déconstruction du projet européen, la réduction des femmes au statut de mères, etc.

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Raymond Aron a écrit que « le choix en politique n’est pas entre le bien et le mal mais entre le préférable et le détestable ». Nous y sommes. À la lumière des conséquences les plus probables du vote de dimanche, le dilemme n’est pas : LFI ou le RN, mais : quelques députés insoumis de plus ou un gouvernement d’extrême-droite. Ainsi posée, l’équation ne devrait causer aucune migraine aux démocrates et aux républicains de ce pays.

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